Ferdinand Hodler

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Histoires de montagneLes artistes des Alpes
Écrit par
Thomas Crauwels
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Ferdinand Hodler (1853-1918) est sans conteste l’un des artistes suisses les plus connus et le plus important du début du XXe siècle. Artiste à la production variée et prolifique ayant peint dans différents styles, peintre touche-à-tout, la montagne n’est jamais très loin de son pinceau.

Une jeunesse marquée par de nombreux deuils

De nombreux deuils émaillent la vie du jeune Hodler, à commencer par le décès de son père alors qu’il n’a que huit ans. Sa mère et tous ses frères et sœurs le suivront quelques années plus tard, tous fauchés par la tuberculose. Cela a profondément marqué le caractère de Hodler, mais aussi sa carrière : sa mère s’est remariée au peintre décorateur Gottlieb Schüpbach, ce qui permet au jeune Ferdinand de s’initier à l’art de la peinture. Il sera par la suite l’apprenti de Ferdinand Sommer à Thoune, qui peignait des tableaux des Alpes pour les touristes. Il s’installe à Genève en 1872, où il devient l’élève de Barthélémy Menn. Il poursuit sa formation artistique à l’étranger, notamment à Paris et à Madrid.

La mission de l’artiste

Selon Hodler, la mission de l’artiste est « d’exprimer l’élément essentiel de la nature, sa beauté, d’en dégager la beauté essentielle ».

Cette conception de l’art va l’amener à supprimer petit à petit toute figure humaine, mais également tout élément ou détail superflu. Il ne reste alors que l’essentiel, la nature elle-même. Cela passe aussi par la lumière, souvent pleine et puissante, révélant l’entier du paysage, comme dans Le Léman depuis Chexbres.

Ferdinand Hodler, Léman depuis Chexbres, 1905, huile sur toile, collection particulière.
Ferdinand Hodler, Léman depuis Chexbres, 1905, huile sur toile, collection particulière.

Symbolisme et parallélisme

Hodler pensait que l’homme fait partie d’une loi universelle, d’un grand tout. Il le rend visible dans ses tableaux par des formes rythmiques se répétant de façon symétrique. Hodler parlait de parallélisme. Il l’introduit dans une toile en 1885, Le Bois des Frères, qu’il commentait en disant que dans une forêt se dégage une impression d’unité causée par le parallélisme des troncs de sapin. Le parallélisme se retrouve dans ses paysages dès 1890. Le parallélisme est avant tout un choix de cadrage, mais Hodler n’hésitait pas à modifier légèrement la géométrie des montagnes si nécessaire. Il n’est ainsi pas rare que les sommets soient plus pyramidaux sous le pinceau de Hodler qu’ils ne le sont en réalité.

Lac de Thoune aux reflets symétriques et Le lac de Thoune depuis Leissigen sont deux tableaux qui permettent de s’en rendre bien compte. En choisissant attentivement le cadrage, Hodler parvient avec le premier à proposer un tableau répondant au principe du parallélisme. Le lac de Thoune depuis Lessigen, avec un cadrage plus large depuis sensiblement le même point de vue, est une œuvre passablement différente, ce qui met bien en exergue le fonctionnement du parallélisme. Encore plus que cette dernière, Lac de Thoune aux reflets symétriques transmet une ambiance suspendue hors du temps.

Ferdinand Hodler, Lac de Thoune aux reflets symétriques, 1909, huile sur toile, musée d’art et d’histoire de Genève.
Ferdinand Hodler, Lac de Thoune aux reflets symétriques, 1909, huile sur toile, musée d’art et d’histoire de Genève.
Ferdinand Hodler, Le lac de Thoune depuis Leissigen, 1904, huile sur toile, Berne, Kunstmuseum.
Ferdinand Hodler, Le lac de Thoune depuis Leissigen, 1904, huile sur toile, Berne, Kunstmuseum.

Avec l’aide des trains de montagne

Hodler profite grandement pour sa peinture du développement des lignes de chemin de fer en montagne. En effet, tous les points de vue desquels Hodler a peint des sommets se trouvent à proximité d’une station de chemin de fer de montagne ou d’un funiculaire, qui connaissent un fort développement dans les dernières décennies du XIXe siècle, comme nous avons eu l’occasion de le voir dans d’autres articles. Hodler a ainsi peint plusieurs tableaux depuis la Schynigge Platte, où la gare ferroviaire est inaugurée en 1893. La Jungfrau dans le brouillard, peint en 1908,est l’un de ceux-ci.

Ferdinand Hodler, La Jungfrau dans le brouillard, 1908, huile sur toile, Genève, musée d’art et d’histoire.
Ferdinand Hodler, La Jungfrau dans le brouillard, 1908, huile sur toile, Genève, musée d’art et d’histoire.

Plus de premier plan

La Jungfrau dans le brouillard est un tableau novateur : il n’y a plus de premier plan, pourtant si essentiel à la composition d’un paysage, et ce depuis la Renaissance. La difficulté à trouver un premier plan approprié avait d’ailleurs posé problème à plusieurs peintres et photographes de montagne. Pour en revenir au tableau de Hodler, la Jungfrau n’occupe qu’une petite partie de la composition totale et semble flotter au-dessus du brouillard, au-dessus de la mer (de nuages).

Certains tableaux donnent une ambiance éthérée à la composition ; les montagnes semblent alors être beaucoup plus légères et presque flotter au milieu de la composition.

Portrait de montagne

Hodler innove aussi la peinture de montagne en ce qu’il propose des tableaux nouveaux : en resserrant la composition, il ne propose plus un panorama, mais concentre au contraire l’attention sur une seule et unique montagne. Hodler peint alors de véritables portraits de montagne. Il est à ce titre révélateur de rapprocher ces tableaux de quelques portraits du peintre, mais aussi quelques autoportraits. Mais il est aussi intéressant de faire le lien entre ce nouveau type de composition et le développement toujours plus important de l’alpinisme, vu que ce dernier se concentre lui aussi sur une montagne en particulier à la fois. Il n’est d’ailleurs pas rare qu’Hodler choisisse le format portrait et non paysage pour ces tableaux.

Ferdinand Hodler, Le Mönch avec les nuages, 1911, huile sur toile.
Ferdinand Hodler, Le Mönch avec les nuages, 1911, huile sur toile.

L’Oberland bernois et le Niesen

Quand bien même il a déménagé rapidement à Genève, Hodler est toujours resté attaché à son Oberland bernois natal. Il a ainsi représenté à de nombreuses reprises les bords du lac de Thoune, en se concentrant particulièrement sur deux montagnes précises : le Stockhorn et le Niesen, deux sommets appréciés et escaladés depuis la Renaissance. Montagne à la forme pyramidale presque parfaite, le Niesen ne pouvait que marquer Hodler, qui le représente effectivement à de nombreuses reprises.

Ferdinand Hodler, Lac de Thoune avec la chaîne du Stockhorn, 1904, huile sur toile, collection particulière.
Ferdinand Hodler, Lac de Thoune avec la chaîne du Stockhorn, 1904, huile sur toile, collection particulière.
Ferdinand Hodler, Lac de Thoune avec le Niesen, 1910, huile sur toile, collection particulière.
Ferdinand Hodler, Lac de Thoune avec le Niesen, 1910, huile sur toile, collection particulière.

Hodler peint en fait souvent les mêmes sujets, sous des ambiances différentes. Il n’y a pourtant rien à voir avec l’impressionnisme : Hodler s’intéresse au symbolisme et non à la retranscription de l’atmosphère, des conditions de lumière etc. spécifiques à un, respectivement plusieurs moments donnés.

Genève et le mont Blanc

Hodler passe les dernières années de sa vie à Genève. Il y peint à plusieurs reprises le massif du Mont-Blanc et le lac, à différents moments de la journée et dans différentes ambiances. Là encore ces tableaux peuvent être rapprochés à certains de ses portraits, même s’il s’agit d’un genre un peu particulier : les portraits de sa femme peints alors qu’elle était mourante, puis morte. L’horizontalité de la composition et du sujet peut être rapprochée dans les deux cas.

Ferdinand Hodler, Léman avec le mont Blanc à la lumière du matin, 1918, huile sur toile, collection particulière.
Ferdinand Hodler, Léman avec le mont Blanc à la lumière du matin, 1918, huile sur toile, collection particulière.

Paysages et expérimentations

Malgré ce que pourrait laisser croire cet article, Hodler considérait le paysage comme un genre mineur auquel il se consacrait lorsqu’il n’avait pas de commande. Plus de 700 tableaux de paysage nous sont tout de même parvenus. C’est dans ces toiles qu’Hodler expérimente le plus souvent, sortant des carcans de la composition classique.

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