Face aux Alpes bernoises, le regard se heurte à une muraille de roche et de glace. Au premier plan, le Schreckhorn, impérieux, s’élève à 4 078 mètres d'altitude. Derrière lui, le Lauteraarhorn déploie sa splendide arête, tranchant le ciel comme une lame d’argent. Après trois jours de neige et de vents violents, la tempête s’apaise enfin. Au sommet, la neige se soulève encore en volutes, emportée par les bourrasques résiduelles.

Depuis la région de Berne, le panorama est saisissant. L’arête qui relie le Nässihorn au Lauteraarhorn se dessine avec netteté. Sauvage, austère, elle semble mener le combat contre les éléments. Les contrastes sont puissants : les ombres creusent les flancs abrupts, tandis que les zones frappées par la lumière révèlent la blancheur éclatante des neiges fraîchement tombées.

Photographier un tel moment ne relève pas du hasard. Il faut des jours, parfois des semaines d’attente et d’anticipation. Savoir où se placer, évaluer la force du vent, deviner si la neige sera assez abondante pour transformer la montagne. Plus d’une fois, l’effort reste vain : les nuages persistent, la lumière se dérobe, et les cimes demeurent cachées. Mais la persévérance finit toujours par être récompensée.

Ce jour-là, le rideau s’est levé. Dans l’entre-deux d’une éclaircie, le Schreckhorn et le Lauteraarhorn se sont offerts dans toute leur splendeur. Entre ombre et lumière, la montagne révélait un visage nouveau, éphémère et bouleversant. Cette photographie en noir et blanc est le témoignage d’un instant rare, où la nature, dans sa force et sa fragilité, nous rappelle la grandeur du monde d’en haut.