Le Weisshorn s’impose ici dans toute sa majesté, ses trois arêtes déployées comme les branches d’un sceptre souverain. À droite, l’arête nord s’élance vers le ciel en franchissant le Grand Gendarme. À gauche, la voie normale s’étire dans une blancheur pure. En arrière-plan, l'on observe la Schaligrat.

Ce jour-là, la montagne s’est offerte sur un lit de nuages, comme posée sur un écrin mouvant. La lumière caressait la face, révélant chaque détail de glace et de roche. Les glaciers scintillaient sous le soleil. Et dans ce décor immaculé, tout paraissait figé dans une éternité fragile.

Derrière cette pureté apparente, une vérité plus sombre se dessine. Le Weisshorn, comme tant d’autres géants, se métamorphose. Ses séracs chutent, ses crevasses s’élargissent, ses glaciers reculent. L’apparente stabilité de ce royaume n’est qu’une illusion : la montagne change, vulnérable aux assauts du temps comme aux bouleversements du climat. Et c’est peut-être pour cela qu’elle me bouleverse tant. Parce qu’elle nous rappelle notre propre fragilité. À travers ce portrait, j’ai voulu rendre hommage à ce colosse des Alpes valaisannes, à la fois éternel et éphémère. Je le photographie inlassablement, comme pour lui offrir une mémoire nouvelle, une autre forme d’éternité. Car si les glaciers disparaissent, si la roche s’effrite, l’émotion que nous transmettent ces sommets, elle, demeurera à jamais.