Portrait chevaleresque de la Dent Blanche, souveraine magnanime des Alpes valaisannes. Cette œuvre majestueuse est l’une de mes rares photographies en couleurs. En ce jour de 2014, je me rends sur la Pointe du Prélèt, au sud du lac de Moiry, pour rejoindre la montagne au fil des arêtes qui séparent le val d’Anniviers du val d’Hérens. Lorsque soudain je sens le vent se lever sans crier gare. Les nuages envahissent le sommet de la Dent Blanche, elle aussi prise au dépourvu. Quand le tonnerre se met à gronder, l’heure n’est plus au doute : il me faut redescendre au plus vite. Je me précipite alors pour me réfugier plus bas, sous ma tente. Il s’en faut de peu que la foudre ne m’attrape. Mais la Dent Blanche, telle une mère protectrice, attire heureusement les éclairs à sa cime, préservant ainsi les vallées alentour de leur incandescence.

Héroïne du tableau, la Dent Blanche ainsi voilée de brume semble vouloir conquérir le ciel. De l’empilement de ses arêtes naît une pyramide remarquable. Notre imaginaire se nourrit de la force poétique de sa roche enneigée. L’abstraction de ses formes et la richesse de ses textures semblent nous révéler l’âme d’une nature toute-puissante et merveilleuse.

Dans cette œuvre se mêlent l’immensité de la nature et la profondeur de mes émotions. La rage fougueuse des vents et le magnétisme de la roche me bouleversent et m’inspirent. J’aime les ambiances dramatiques, les atmosphères à fendre l’âme. Et quand la tempête s’engouffre au cœur des Alpes, que les éléments s’entrechoquent en altitude, je ressens le besoin viscéral de me trouver là. Au plus près de la montagne, je deviens le témoin de ses plus belles victoires. Voilà pourquoi ce jour-là j’ai réussi à photographier cette scène magistrale. Car c’est dans le chaos que naissent mes plus belles œuvres.